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Jamais deux sans trois….mystère résolu : un 14ème « 6000 » en Bolivie !

14 janvier 2021

Montagnes

Jamais deux sans trois….c’est souvent le cas dans les explorations un peu compliquées. Difficile de tout voir et réussir du premier coup. La première fois que nous avions tenté le Capurata via l’Acotango, ce fut en 2017. Nous avions alors tenté l’exploit audacieux de réaliser les deux sommets Acotango et Capurata en une seule journée, sans emmener de quoi bivouaquer. C’était ambitieux mais nous avions presque réussi !!!!Nous avions marché alors 15 heures sur presque 20 kms, un énorme challenge à ces altitudes, entre 5500m et 6000m. Cette fois-ci, les pénitents sous le sommet nous avaient stoppés à 5900m d’altitude. Nous avions alors essayé de passer dans ce chaos de pics de glace, et étions à 1 heure, 1 km et moins de 100m de dénivelé du sommet. Rien à faire !! Nous étions redescendus très frustrés, non pas que nous avions manqué la belle vue du sommet, mais l’idée était de vérifier si ce sommet était alors un quatorzième « 6000 » de Bolivie. Un jour, alors que je finissais mes 13 « 6000 » de Bolivie, un andiniste et himalayiste reconnu, Maximo Kausch, brésilien vivant entre les Andes et l’Hymalaya, m’avait alors écrit pour me dire qu’il existait un 14ème « 6000 », le Capurata !!! Depuis, cette époque, je cherchais un créneau pour y aller. C’était donc super fatiguée et frustrée que je suis redescendue du Capurata sans pouvoir fouler son sommet…tant d’efforts et de sacrifice pour rien, c’était très frustrant !

Fin 2019, après les violences et mouvements sociaux, j’avais besoin de prendre l’air. C’était décidé, j’avais proposé à Flora de venir avec nous pour tenter l’expérience Acotango-Capurata mais cette fois-ci en tente et en deux jours. La météo n’était pas au top, mais cela allait peut être s’arranger….Finalement, tout était prêt, tentes, lyophilisés, motivation, ….et malheureusement une tempête de neige nous stoppa dans la nuit lors de notre approche en 4×4. Nous passâmes la nuit dans la voiture et au petit matin, nous dûmes penser au plan B. Ce jour-là, nous sommes montés au sommet de l’Acotango que Flora n’avait pas encore grimpé, en mode raquettes sans raquettes. Ce fut physique et fatigant, mais tellement sympa de grimper dans une épaisse poudreuse…je m’en rappellerai toute ma vie, j’avais alors brûlé, sur le visage et les bras et cela m’avait valu un nouvel an confiné chez moi !!

En octobre 2020, c’était reparti pour la troisième tentative, le bon timing cette fois-ci. La saison dans la Cordillère Royale était finie, trop de nuages, on était ENFIN sortis de 6 mois d’enfermement strict à La Paz….on pouvait enfin se déplacer sans trop de risques. Les parcs nationaux devaient ouvrir le 20 octobre. Le temps annoncé état splendide, grand soleil et peu de vent. C’était le moment idéal pour tenter encore une fois le Capurata ! On mettait toutes les chances de notre côté. On prévoyait une nuit en tente entre l’Acotango et le Capurata. Juan Carlos allait nous aider comme porteur. L’entrée au parc national Sajama fut un peu chaotique, mais avec un peu de négociation Hugo a pu convaincre le garde du Parc national de nous laisser passer sans test pcr…..on était dans la place…il ne restait plus qu’à……on peaufine les derniers préparatifs au refuge Alta Montaña d’Ignacio et Reyna, et nous sommes fin prêts. Cette fois-ci je suis persuadée que la « cumbre » nous appartient. Trop contente de découvrir enfin si ce sommet est un autre « 6000 ».

Le temps était parfait, pas de vent, grand bleu andin. Les volcans sont souvent synonymes de vent violent, de 50 à 80 kms/h voire plus de 100 ! il y fait froid et le vent ne nous laisse pas profiter des paysages et nous empêche même parfois de monter. Nous partîmes vers 08h00 du matin du petit village de Sajama. Nous étions fin prêts. La seule inconnue était la piste des mineurs qui montent sous le sommet. Serait-elle bien dégagée ou nous faudrait il porter tout notre équipement depuis une altitude plus basse ? Je croyais en ma bonne étoile et étais persuadée que tout allait bien se passer. La chance nous souriait enfin. Il n’y avait pas de neige et le tracteur était passé peu de temps avant notre arrivée. Bingo ! Nous allions pouvoir monter en voiture à plus de 5500m d’altitude. Et c’était une excellente nouvelle. Grover stoppa le véhicule à exactement 5550m. La neige ne nous laissa pas aller plus loin. Pour Grover, découvrir ces paysages enneigés était une véritable joie. Beaucoup de Boliviens ne connaissent pas leur pays. Petit à petit, les habitudes changent et ils commencent tout juste à vouloir voyager au sein de leur propre pays et à aller à la découverte des paysages variés et somptueux qu’offre leur pays.

Nous voilà donc, Hugo, Juan Carlos et moi même chargés comme des « Ekekos » à l’assaut des flancs de l’Acotango. Porter à ces altitudes n’est pas un exercice facile mais je me rassurais en pensant que nous n’avions que 400m de dénivelé à faire. Et en outre, les conditions étaient optimales, il faisait chaud, la vue sur la chaîne de volcans enneigés était somptueuse. Cela ne fut pas très difficile de monter progressivement sous le sommet de l’Acotango vers 5910m d’altitude. Une petite pause déjeuner sur les arêtes et nous voilà en train de basculer sur l’autre versant pour descendre vers notre campement entre les deux montagnes. Les nuages se chargent un peu dans l’après-midi. Hugo fit une belle glissade tête la première sur les flancs de la montagne….plus de peur que de mal…son bâton avait plié sous le poids et cela l’avait déséquilibré. Parfois, il ne faut pas grand-chose pour qu’une belle balade se transforme en cauchemar. Nous poursuivîmes notre descente vers le campement. Un moment, nous avions envisagé de monter un peu sur les flancs de l’autre volcan, afin de prendre un peu de hauteur. Mais la fatigue se faisait un peu sentir avec notre chargement. Finalement nous camperons à 5400m au pied du Capurata et partirons cette nuit vers 02h00. Pour ma part, j’avais un peu mal à la tête, peut être à cause du poids. J’allais donc me reposer un peu pour attaquer cette nuit cette longue montée.

Le réveil sonna à 01h00 du matin. La nuit était calme, merveilleusement calme. Trop bien, j’étais heureuse de penser que nous allions monter tranquillement sans souffrir des vents violents et du froid polaire. Nous partîmes comme prévu à 02h00 du matin. La montée commença par un pierrier très instable et assez pentu. Progression délicate pour les 100 premiers mètres, puis les pentes s’adoucirent cela se fut plus facile et progressif. Le manteau de neige nous facilitait aussi la tâche. Le froid intense se faisait sentir même sans vent. Quelle chance d’avoir ces conditions optimales. Un peu plus haut vint ce passage en rochers. Je me rappelais bien cet endroit un peu délicat. Ce n’était pas très compliqué, mais de nuit, tout est un peu plus angoissant. Une fois ce passage derrière nous, la progression se fit plus simple sur les arêtes. Peu à peu, le jour commençait à se lever et nous arrivâmes après 4 heures d’ascension au col à 5900 mètres dominant le cirque formé par les arêtes sommitales. Nous étions alors de nouveau au même endroit qu’en 2017. Le sommet est une espèce d’amphithéâtre formé par des arêtes. Le point culminant se trouve à notre gauche. Il fallait donc traverser tout le cirque et remonter sur les arêtes en face de nous sur la gauche, chose que nous n’avions pas pu faire il y a trois ans à cause d’un champ impénétrable de pénitents.

Cette fois-ci, cela semblait plus praticable. Il y avait certes des pénitents, mais ils étaient plus petits et moins nombreux. Je croisais les doigts. Nous n’allions pas échouer au même endroit une deuxième fois.  Hugo avait son plan. Il réussit à trouver le meilleur chemin pour traverser les pénitents et arriver sur un plateau de neige sous le sommet. J’étais folle de joie. Il ne nous restait plus qu’à nous hisser sur les arêtes par une petit mur de glace…une formalité et l’arrivée au sommet fut une explosion de joie !!!Je me sentis envahie de bonheur par cette arrivée sur cette arête effilée et la vue était juste incroyable.  Il ne restait plus qu’à savourer et à vérifier bien sûr l’altitude de ce volcan. En arrivant, mon GPS marquait 5997m et mon cœur se serra à l’idée que nous nous étions trompés….peut être que ce n’était pas un 6000….quelle déception….mais nous étions un peu sous le point le plus haut. Hugo regarda alors son GPS. J’avais pris la précaution de prévoir deux GPS pour confirmer l’altitude. Et le sien marquait 6000m…..ouah, je sautais de joie….du coup, nous montâmes sur le point le plus juste derrière nous et le mien marqua alors aussi 6000m. Les deux GPS se sont alors stabilisés même à 6002 voire 6004m. il n’y avait plus de doute possible. Le Capurata est un autre 6000 de Bolivie !!! J’étais trop trop heureuse de ce résultat et de la réussite de noter expédition.

Il ne nous restait plus qu’à savourer et à descendre jusqu’au fond de la vallée où nous attendait Grover. Nous savions que la route était longue, 10 kms de descente jusqu’à la voiture…..mais, contrairement à l’autre fois, nous avions du temps devant, nous étions au sommet vers 08h00 du matin et nous avions toute la matinée pour rejoindre la voiture.